Janvier 2018. Lucie Botiveau est comédienne dans l’Agence de Voyages Imaginaires, elle habite alors à l’Estaque et traverse une crise de questionnements existentiels. Un jour, elle se retrouve avec mon premier roman « Les Encerclés » entre les mains… Mon roman résonne alors parfaitement avec ses questionnements du moment, à tel point qu’elle m’adresse un long mail personnel pour me faire part de ses impressions de lecture: « si un jour je décide de changer de vie, tu feras partie des responsables. » On ne se connaît alors pas du tout. Je me rappelle avoir vendu ce livre à son frère Raphaël lors d’une dédicace à Gibert Joseph à Marseille, et je m’en rappelle car c’était la première fois que quelqu’un me demandait une dédicace spéciale: « je voudrais que tu écrives ce que tu as retenu de ton adolescence ». Il avait tout de suite pensé à sa soeur en rencontrant mon livre et avait décidé de le lui offrir. Quelle bonne idée décidément!

Donc lorsque cette inconnue Lucie m’écrit ce jour-là, le jeudi 11 janvier 2018, je suis évidemment émue et, scotchée sur place, je décide de lui répondre quelque chose de personnel également: c’est le début d’une correspondance qui nous donnera rapidement à l’une comme à l’autre l’envie de nous rencontrer. Un mois plus tard j’ai l’occasion d’aller à l’Estaque et on convient d’un rendez-vous. On fait connaissance, on sympathise. Je songeais à adapter mes romans en livres audio depuis un moment, non seulement pour les personnes mal voyantes mais aussi pour les personnes trop âgées, ou trop pressées et affairées, fatiguées de faire travailler leurs yeux toute la journée, rebutées par la lecture ou simplement désireuses de renouer avec l’aspect plus vivant d’une histoire qu’on s’entend raconter le soir… mais je n’avais pas trouvé de voix pour assurer la lecture. Dès que je parle de ce projet à Lucie, elle saute de joie. Voilà que nous avions toutes les deux trouvé la voix (la voie)!! « Carpe Noctem » était alors encore en construction. Au printemps, dès que le roman a été achevé, on s’est attaquées pour de bon au projet de livre audio.

En fouinant dans mes mails j’ai pu retrouver tous nos premiers échanges. Le 30 mai, alors que j’avais terminé la version d’essai de Carpe Noctem et que je l’envoyais à Lucie pour une première lecture, je lui écrivais: « Je suis super excitée à l’idée qu’on travaille ensemble sur un livre audio, je pense qu’on va se régaler et qu’on va faire un truc bien. »

Nous n’avons alors aucune connaissance ni expérience dans la création d’un livre audio, ni compétences en ingénierie du son, mais nous sommes passionnées et déterminées à créer une oeuvre de qualité, artisanale, authentique et survoltée. On fonce dans ce projet tête baissée en se disant qu’on résoudra les difficultés au fur et à mesure qu’elles se poseront, preuves humaines que « tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n’abandonne jamais ».

Le bonheur des amitiés et des projets qui se croisent fait que rapidement, fin 2018 mon amie précieuse Tiffany rejoint la réalisation du projet. Pendant ses études elle s’est spécialisée dans la voix et le passage d’un récit à l’oralité et, ça tombe bien, elle est passionnée par les créations audios! D’un autre côté arrive ensuite Kévin, mon pote musicien qui est en train de se former pour être ingénieur du son et qui est bien partant pour participer au projet, nous donner des conseils, nous assister dans l’enregistrement. Il fera même une bonne partie du déblayage audio indispensable pour préparer le mixage. C’est grâce à lui que notre cabane d’enregistrement a pris des allures de véritable studio professionnel artisanal!

Nous avons terminé tous les quatre les enregistrements des voix en février 2020, fiers d’avoir pu mener le projet jusque-là avec presque rien. Les enregistrements se sont faits dans ma chambre d’enfance chez mes parents à Digne les Bains, sous forme de sessions de deux ou trois jours en pension joyeuse généreusement nourries par Alda. Des moments de bonheur intense, créatif et collectif que je n’oublierai jamais, et qui font partie de ces choses précieuses qui donnent un sens fort à la vie.

Dès le départ, dès le jour de notre rencontre à l’Estaque et ensuite à Reillanne dans la coloc de Lucie lors des longues séances de travail préparatoire aux enregistrements, on avait sous-estimé l’ampleur de la tâche… et je crois que c’est ce qui nous a permis de nous lancer pour de vrai dans ce projet. Si on nous avait dit à quel point ce serait du travail, à quel point ce serait long et compliqué de mener ce projet à bien, on se serait peut-être laissé décourager. Mais on ignorait les difficultés, on ne savait que notre fougue, et c’est tant mieux.

Chacune de nous travaillant entièrement de façon bénévole sur ce projet, il a bien fallu maintenir nos autres activités (rémunératrices notamment) ce qui ne nous laissait qu’un temps réduit consacré au livre audio. Le fait de travailler en équipe a aussi compliqué l’agencement du calendrier et de nos dates de travail. Malgré tout ça nous avons tenu bon et nous avons terminé l’enregistrement, mais avec toujours un temps infini de retard par rapport à ce qu’on avait estimé au départ (j’avais prévu la sortie du livre audio fin 2019!!). Le retard a eu pour conséquence de nous faire perdre Kévin en cours de route car ayant terminé sa formation d’ingénieur du son, il s’est retrouvé avec un travail monstre et n’a pas pu suivre l’autre monstre de travail qu’était le mixage de l’enregistrement un peu trop chaotique d’un roman de 500 pages.

Quelques problèmes matériels (le vol d’un ordinateur) et ma trèèèès longue dernière ligne droite pour terminer « Plus que les étoiles », qui a nécessité de mettre à l’arrêt les autres projets, ont encore retardé l’aboutissement du livre audio final. Mais maintenant avec l’achèvement de ce dernier roman on va pouvoir reprendre le mixage et cette fois on compte bien mener enfin le projet à son terme, courant 2023!